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Sans Pays Fixe
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12 décembre 2005

En attendant l’orage

Les feuilles entament une ronde depuis le coin de la rue jusque devant l’entrée de la boutique, emportées par le souffle du vent soudain devenu froid. J’avais presque oublié l’existence des arbres dans Ho Chi Minh Ville. Ce rappel est aussi rafraîchissant que la fraîcheur qui s’installe soudainement sur la ville. Les gouttes de sueur ont séché sur ma nuque, mes cheveux ne collent plus. En face, un vieillard à la vieille casquette poussiéreuse sort lentement de son magasin, déploie une petite bâche pour couvrir les selles des trois motos à l’arrêt devant le magasin puis disparaît tranquillement dans l’arrière boutique. Je demande du regard à Tuan s’il faut rentrer notre moto, mais je comprends que nous allons bientôt repartir. Je me souviens de ce qu’il m’a dit tantôt sur le chemin. ‘-J’ai demandé au ciel d’attendre que nous soyons arrivés! On dirait qu’il est d’accord. -Dans ce cas, cela veut dire qu’il va pleuvoir très fort, car le ciel doit se retenir pour toi!’ Le délai demandé au ciel est maintenant expiré. Reste à savoir si nous allons rentrer à l’université secs ou complètement trempés. Nous avons oublié l’imperméable à la maison, bien sûr. Il est resté accroché sur le mur, je le vois dans ma tête, il est tout content du tour qu’il nous a joué. L’orage promet d’être violent encore. Je me rappelle le bruit du tonnerre d’hier. La pluie était d’une violence terrible, les éclairs bien plus effrayants encore. Je me souviens avoir pensé que la fin du monde ressemblera un peu à ça. Quand la pluie a cessé, de nombreuses rues se sont retrouvées inondées, créant des embouteillages sur toutes les grandes artères dans la soirée quand les trombes d’eau ont cessé. Une cacophonie incroyable résonnait dans la ville. Motos et voitures klaxonnaient pour protester comme l’immobilité. Les gens se regardaient, demeuraient le plus calme possible en guettant le moindre passage qui permettra de gagner un pas ou deux. Mais devant, à perte de vue, une marée de motos collant de tous les côtés les taxis et les gros 4x4 des entrepreneurs qui veulent rejoindre leur villa en dehors de l’agglomération. Tuan semble dire qu’il nous reste largement le temps. Il doit mieux prévoir l’orage que moi, une question d’habitude, d’optimisme peut-être aussi. Il est toujours optimiste et le ciel semble vouloir nous accorder juste le temps nécessaire pour nous rendre à l’université. Assise à l’arrière de la moto, un petit frisson me traverse le dos. Le vent souffle fort, la poussière grise et brunâtre valse avec les feuilles et les détritus de la ville. Je dois faire attention à baisser la tête parfois. L’air devient de plus en plus nauséabond, je peux sentir les relents des égouts malgré mon masque qui couvre toute la partie de mon visage depuis le nez jusqu’à la base du cou. Tuan roule très vite, il sait que le temps lui est compté. Je me blottis contre lui, dans quelques secondes nous arrivons et il me déposera au bureau de vente et repartira pour l’atelier. Je ne le reverrai que trois heures plus tard alors je profite de cette étreinte, la seule qui soit permise ici une fois dehors. Je suis un peu triste lorsque la moto redémarre. dscn3010
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